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L’économie française : Éternelle convalescente

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Ceux qui attendaient un verdict tranché, à même, soit de valider la politique économique du gouvernement, soit d’en souligner les limites, en seront pour leurs frais. Au lendemain de la présentation en conseil des ministres du projet de loi de finances 2016, les prévisions de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) dressent un tableau en demi-teinte de l’économie hexagonale pour la fin de l’année.

« Le produit intérieur brut (PIB) français a déçu au deuxième trimestre [avec une croissance nulle, après + 0,7 % au premier trimestre], après un début d’année dynamique. Mais les vents favorables qui existaient il y a trois mois [recul du pétrole, de l’euro et mesures de soutien du gouvernement] sont encore bien présents », a résumé, jeudi 1er octobre, Vladimir Passeron, chef du département de la conjoncture à l’Insee.

Parmi les bonnes nouvelles, la demande des ménages reste bien orientée, souligne l’Institut. Ces derniers « bénéficient de salaires qui augmentent encore, alors que l’inflation reste basse » en raison du repli des cours du pétrole, détaille M. Passeron. Le pouvoir d’achat devrait ainsi augmenter de 1,7 % en 2015. Un record depuis 2007.

Des chefs d’entreprise plus confiants

Quant aux exportations, elles bénéficient d’un euro bas et du dynamisme des partenaires commerciaux européens de la France, ainsi que des succès commerciaux tricolores en matière navale et aéronautique, Airbus et Rafale en tête.

Côté entreprises, le climat des affaires, c’est-à-dire le regard que portent les chefs d’entreprise sur la conjoncture hexagonale, « s’est de nouveau amélioré cet été ». Il a notamment décollé dans les services, longtemps restés à la traîne de l’industrie, et s’établit, au total, à un plus haut de quatre ans en France pour le mois de septembre.

Les marges des entreprises se sont également nettement redressées au premier semestre : elles devraient atteindre 31,3 % sur l’ensemble de l’année 2015, contre 29,5% un an plus tôt. Un rebond dû autant à la faible facture pétrolière qu’aux mesures mises en place par le gouvernement pour relancer l’économie (crédit d’impôt compétitivité emploi, ou CICE, et pacte de responsabilité).

Mais ces bonnes nouvelles doivent être relativisées: les entreprises tricolores restent toutefois moins rentables que début 2011 (31,7 %) et nettement en-deçà de leur niveau d’avant la crise financière (33,7 % fin 2007).

C’est bien là que le bât blesse : malgré un alignement des planètes inédit depuis huit ans, la France reste engluée dans une croissance poussive et heurtée, qui la place à la traîne de la zone euro.

L’ingrédient manquant : l’investissement

« L’ingrédient qui manque à la reprise française par rapport [aux pays voisins], c’est l’investissement dans le secteur de la construction », souligne l’Insee. Les dépenses en logement des ménages ont payé un lourd tribu à la crise : elles ont chuté de 25 % depuis 2007 et devraient continuer de reculer au second semestre. De quoi peser pour 0,4 point de PIB sur les prévisions de croissance tricolores.

Conséquence : la hausse du PIB devrait atteindre 1,1 % en 2015, légèrement au-dessus de la prévision du gouvernement (1 %) mais en-dessous de la précédente estimation de l’Insee (1,2 %). « C’est mieux qu’au cours des trois dernières années, où l’on avait en moyenne + 0,4 %, mais c’est moins que dans la zone euro, où la croissance devrait atteindre 1,6 % cette année », indique M. Passeron. Dans le détail, la hausse du PIB devrait atteindre 0,2 % au troisième trimestre, puis 0,4 % au quatrième.

Surtout, en dépit d’une demande robuste, de conditions de financement arrangeantes et d’une rentabilité retrouvée, le franc redémarrage de l’investissement des entreprises, attendu comme le Graal pour une véritable reprise économique, se fait toujours désirer. Il devrait « accélérer modérément » au second semestre, note l’Insee, à + 0,5 % au troisième trimestre et 0,6 % au quatrième.

Trou d’air

Pas assez pour inverser la courbe du chômage. L’emploi en France devrait augmenter de 116 000 postes en 2015, après seulement 24 000 en 2014, grâce au double effet de la reprise et des mesures de soutien économique (CICE et pacte de responsabilité). De quoi compenser l’augmentation de la population active, donc stabiliser le taux de chômage (10,3 % fin 2015 en France, dont 10 % en métropole). Mais pas le faire reculer…

Au final, « l’activité devrait progresser par à-coups, et le troisième trimestre pâtira encore de la baisse temporaire de la production industrielle, survenue au printemps et en juillet », souligne M. Passeron. Un trou d’air a priori dû à des facteurs ponctuels (grèves, arrêts techniques d’usines) mais qui « tranche avec les réponses optimistes des chefs d’entreprise à nos enquêtes de conjoncture », souligne Dorian Roucher, chef de la division synthèse conjoncturelle de l’Insee.

Une croissance en éternelle convalescence, une forte demande qui n’incite ni à pousser les feux de la production, ni à investir… Ces paradoxes font perdre leur latin à plus d’un économiste. Et accréditent l’idée, de plus en plus répandue, que la période actuelle de sortie de crise diffère beaucoup des précédentes.

« En France, on assiste à un phénomène de rétention de main d’œuvre : les chefs d’entreprises sont nombreux à indiquer qu’ils peuvent encore produire plus sans embaucher davantage », souligne Eric Heyer, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui estime ce sureffectif à 85.000 postes.

Le Monde


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